Posts Tagged ‘organoïde’

Du prêt à porter au sur mesure !

vendredi, juin 30th, 2023

Se rapprocher au plus près des conditions réelles dans lesquelles se développe un processus néoplasique est le voeu le plus cher de tous les thérapeutes. Les lois sont établies à partir d’échantillonnages représentatifs mais chaque individu reste une singularité qui ne s’inscrit pas nécessairement dans la moyenne voire dans la dispersion de la loi normale de Gauss. On sait que selon cette loi, telle thérapeutique montre son efficacité dans la majorité des cas mais on sait également qu’il existe des patients qui échappent à ce schéma. Il faut donc imaginer et se donner les moyens de réaliser l’adéquation parfaite entre la néoplasie de la personne X et le traitement qui va lui être apporté. Dans ce but l’idée est de reproduire au plus près les conditions dans lesquelles se développe la tumeur située qu’elle est dans un organisme qui lui répond par une modification de la structure de son environnement immédiat. Le défi est donc de réussir à reproduire artificiellement et le plus exactement possible les conditions réelles pour que la thérapeutique adoptée soit la mieux adaptée. Les cultures cellulaires bidimensionnelles du début du XXème siècle ont ainsi laissé la place aux cultures tridimensionnelles parmi lesquelles la technique des organoïdes permet une meilleure compréhension de la réalité des phénomènes. En effet ” Les agrégats cellulaires reflètent la signalisation moléculaire qui se produit entre les cellules d’un même tissu en permettant des interactions cellule-cellule et cellule-matrice. De plus, les cultures 3D permettent des études plus fiables concernant les aspects biologiques tels que la viabilité, la prolifération, la morphologie, la différenciation et le métabolisme des médicaments” : c’est le sujet de l’article A 3-D Tumor Microenvironment for Personalized Immunotherapy. Une élégante manière d’aborder la difficulté de la “multifactorialité” d’un évènement en biologie comme ailleurs !

“Horribile visu”

mardi, août 24th, 2021
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“L’oeil était dans la tombe et regardait Caïn” ! Comment ne pas y penser devant l’illustration de l’article Lab-made mini brains grow their own sets of ‘eyes’ et ce d’autant plus que la conscience humaine y est largement questionnée. C’est particulièrement le cas quand la finalité, celle d’un avenir meilleur pour l’humanité, valide le protocole expérimental et donc ses résultats. Ainsi la technique d’obtention des organoïdes s’inscrit-elle dans cette vision téléologique d’une amélioration des affections/anomalies qui peuvent survenir ultérieurement sur cette structure. Cette notion est à mettre en balance avec “la soif de connaissance de l’homme” telle que l’entendait le Stagirite. Et donc subséquemment dans l’idée que la fin justifie les moyens. L’embryologie de l’oeil est un sujet ancien et l’un des premiers à avoir mis en place l’idée d’induction/compétence qu’avait illustré Hans Speeman, prix Nobel de Médecine en 1935, pour sa découverte d’un centre organisateur (organisateur de Speeman) dans l’embryogenèse. Schématiquement des cellules “inductrices” agissent sur des cellules “compétentes” qui répondent de façon spécifique. On imaginait “une substance” délivrée par les premières et à laquelle les secondes étaient sensibles. On déchiffre depuis ce que sont ces facteurs. L’étude citée rapporte la mise en place de réseaux neuronaux sensibles à la lumière. En vingt ans, la construction des organoïdes s’est étendue à la “totalité” des organes. Pris séparément chacun fonctionne correctement ce qui permet d’imaginer une aide ultérieure au diagnostic et à la thérapeutique sauf qu’il manque peut-être un certain degré de coopération entre eux pour reproduire le vivant. Donc il ne reste plus qu’à les assembler, ce qui sera fait lorsque quelques nouvelles étapes auront été franchi ! Faut-il le craindre ou l’espérer ?

Pensée venue d’ailleurs

dimanche, février 21st, 2021
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Après avoir distingué l’homme de Néandertal (nom d’une petite vallée d’Allemagne en Rhénanie-du nord Westphalie, qui par un heureux hasard signifie “vallée de l’homme nouveau”) de l’homo sapiens grâce à ses critères morphologiques, la science s’intéresse aujourd’hui non pas à un contenant osseux celui de l’encéphale mais à son contenu lui-même, en l’occurrence à l’encéphale du dit Néandertal (Neanderthal-like ‘mini-brains’ created in lab with CRISPR). Depuis 2014, on montré qu’un individu pouvait renfermer de un à trois pour cent d’ADN d’origine néandertalienne ainsi les relations entre Sapiens et Néandertal permettent-elles, dans le cas présent, d’étudier un gène particulier le gène NOVA1. Ce dernier codant pour une protéine de liaison à l’ARN spécifique des neurones (au niveau des synapses), les chercheurs ont mis au point des organoïdes cérébraux où l’on a procédé à la réintroduction de la variante archaïque de NOVA1 avec pour résultat une altération du développement par rapport à l’organoïde humain. Il ne faudrait pas pour autant en tirer des conclusions (hatives) sur le cerveau de l’homme de Néandertal dans la mesure où l’organoïde reste peu représentatif de l’organe dans sa totalité ! Or ces minuscules structures au centre de nombreux questionnements, en particulier d’ordre éthique, interrogent sur l’existence “possible” d’une conscience (Can lab-grown brains become conscious? https://media.nature.com/original/magazine-assets/d41586-020-02986-y/d41586-020-02986-y.pdf). Mais faut-il vraiment chercher à savoir ce à quoi pensait l’homme de Néandertal !

D’une activité à l’autre

dimanche, septembre 1st, 2019

Les organoïdes sont à l’honneur quelque soit l’organe dont ils sont comme un “facsimilé”, aussi proche que possible de l’original. Le système nerveux central n’est pas en reste et voilà qu’un organoïde cérébral émet des ondes qui plus est se modifient en se complexifiant au fil du temps : Human Cortical Organoids Model Neuronal Networks ( https://www.the-scientist.com/news-opinion/human-cortical-organoids-make-brain-waves-66368 ) ! De là à y voir “l’équivalent” du cerveau d’un prématuré humain il n’y aurait qu’un petit pas que l’on aimerait bien franchir. Malheureusement si cette mini structure tridimensionnelle est bien constituée de cellules différenciées, neurones et cellules gliales, on peut la comparer à une île dépourvue de toute connection avec une quelconque autre structure ce qui à tout le moins est loin de pouvoir être assimilé à un cerveau humain même prématuré ! Ce n’est pas l’activité électrique constatée qui interroge, c’est la synchronisation de cette activité entre les cellules évoquant une maturation qui ne se poursuit néanmoins pas au delà de quelques mois. Si ces oscillations répondent à certaines drogues il n’en reste pas moins que les “assimiler” à des ondes cérébrales reste du domaine de la conjecture. Si telles elles étaient se reposerait urgemment la question éthique de savoir à quoi pense un organoïde cérébral !

Où doit-on s’arrêter ?

mercredi, novembre 21st, 2018

Deux articles à lire, à relire, re-relire puis à méditer pour bien comprendre de quoi il retourne ! Il faut néanmoins respecter un certain ordre. C’est la raison pour laquelle on commencera avec profit par : How biologists are creating life-like cells from scratch (https://www.nature.com/articles/d41586-018-07289-x?utm_source=briefing-dy&utm_medium=email&utm_campaign=briefing&utm_content=20181108). Pour faire une cellule il est indispensable de maîtriser au moins quatre conditions essentielles que l’on serait en droit de qualifier de vitales (sans jeu de mots) : la compartimentation, le métabolisme, le stockage et la gestion des informations. Cet ensemble repose sur les qualités exceptionnelles de structures  qui n’ont pas fini d’étonner biologistes, chimistes et physiciens, les membranes. Comme on le sait depuis longtemps il est plus facile de défaire que de refaire, mais on se dit que le but ne doit pas être si éloigné quand on en est à se demander si quatre cent soixante treize gènes est le bon nombre pour que “ça marche”. Plusieurs étapes franchies allègrement et l’on est en mesure d’aborder le second article : Lab-grown ‘mini brains’ produce electrical patterns that resemble those of premature babies (https://www.nature.com/articles/d41586-018-07402-0?utm_source=briefing-dy&utm_medium=email&utm_campaign=briefing&utm_content=20181116). La technique est autre mais pas moins sujette à question à propos des ondes que l’organoïde cérébral génère. Après ces deux lectures, deux questions s’imposent : la cellule synthétique appartiendra-t-elle au monde vivant quand elle fera montre d’adaptativité, l’organoïde cérébral sera-il en mesure d’évoluer vers la conscience ?

L’organoïde et l’éthique

dimanche, mai 6th, 2018

Un organoïde est une structure tri dimensionnelle (multicellulaire) qui peut-être schématiquement assimilée à un micro organe à partir duquel il est devenu possible d’étudier des propriétés spécifiques de son homologue dans des conditions qui se rapprochent de la normale. Cette technique a pris son essor depuis une quinzaine d’années et supplante largement les cultures cellulaires en couche qui l’avaient précédée. Les organes ainsi “mimés” sont nombreux et l’un en particulier, en raison de son statut d’organe “noble” s’il en fut, est devenu sujet et non objet de questionnements. Il s’agit de l’organoïde cérébral obtenu à partir de cellules souches pluripotentes qui vont former de petites sphérules pouvant reproduire différentes zones cérébrales en fonction ou non de l’ajout de facteurs exogènes (Obtenir des ébauches de cerveau en laboratoire : les organoïdes, http://www.frcneurodon.org/informer-sur-la-recherche/actus/obtenir-ebauches-de-cerveau-laboratoire-organoides/). En 1818, Mary Shelley imaginait le DR Frankenstein et sa créature. Dans l’œuvre originale, celle ci était  loin d’être dépourvue d’intelligence mais rejetée par la société elle choisissait de faire le mal, démontrant l’existence d’un conscience que traduisait sa haine envers autrui et son concepteur. A l’inverse on pouvait se demander si son créateur n’avait jamais éprouvé le moindre sentiment envers sa créature. Et voilà que pourrait se reproduire une situation pas si éloignée comme en témoigne l’article The ethics of experimenting with human brain tissue (https://www.nature.com/articles/d41586-018-04813-x?utm_source=briefing-dy&utm_medium=email&utm_campaign=briefing&utm_content=20180426) autorisant à ce poser la bonne question, celle qui n’avait pas été envisagée il y a deux siècles. La recherche va effectivement dans le sens de l’étude des fonctions cérébrales parmi lesquelles on ne peut en  ignorer certaines parmi lesquelles la conscience. Bien que cette étape soit probablement encore lointaine, la question est en germe et son éclosion devra avoir lieu après que l’on ait trouver une réponse : en schématisant à l’extrême le but de l’expérience étant d’obtenir une réponse à un stimulus, jusqu’où est-on prêt à aller ?

L’éthique du cobaye à l’organoïde

samedi, juillet 23rd, 2016

anatomieLa méthode expérimentale serait née avec Claude Bernard ce qui la fait remonter au XIX° siècle. On sait pourtant que l’expérimentation animale est beaucoup plus ancienne comme en témoigne Galien qui tenait autant au raisonnement qu’à l’expérience. Ce n’est pas sans raison que l’on parle des animaux de laboratoires, qui outre le fait qu’ils y vivent, participent pour beaucoup à la vie du dit laboratoire dans la mesure où la vie de l’un dépend de l’autre et inversement ! L’originalité de Claude Bernard tient dans le fait qu’il a introduit une démarche rigoureuse selon schématiquement trois étapes : poser la bonne question, proposer une réponse par le biais d’une hypothèse, répondre après avoir testé la dite hypothèse. L’expérimentation animale semble la démarche la plus raisonnable en permettant, grâce au raisonnement analogique, le glissement de la réponse de l’animal à l’homme. Ce procédé ne fut pas exempt d’erreurs comme en témoigne la connaissance progressive de la circulation sanguine depuis Galien en passant pas Vésale pour aboutir à Harvey. Depuis toujours l’hypothèse doit être vérifiée, et la dissection humaine a traversé les époques avec plus ou mois de succès, d’autant que l’expérimentation animale  ne rencontrait pas les mêmes difficultés grâce à Descartes qui plaidait pour l’animal machine ! Il est certain que l’animal de laboratoire vit dans des conditions qui ne sont pas celles de son milieu naturel, ce qui peut être la cause d’un premier degré de questions sur l’exactitude des résultats observés. Mais à cette question de bon sens vient s’en greffer une autre relevant plus de l’éthique et qui concerne la souffrance infligée même s’il existe aujourd’hui une charte qui considère l’animal comme un être vivant doué de raison ( il ne faut pas oublier, quand même, que l’on est passé du mammifère au nématode, de la souris au C. Elegans). Aujourd’hui se développe une nouvelle technique bien particulière, celle des organoïdes : réaliser en trois dimensions une culture cellulaire d’un type bien particulier puisqu’elle reproduit un organe réduit, certes dans un milieu artificiel mais capable de reproduire les fonctions de l’organe originel. Tout serait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, si ne se posait alors la question des cellules choisies pour fabriquer cet organoïde : cellules animales vs cellules humaines, cellules souches vs cellules matures reprogrammées. Si les avantages semblent multiples, on le voit les questions ne sont pas en reste (Will Organs-in-a-Dish Ever Replace Animal Models? http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/46588/title/Will-Organs-in-a-Dish-Ever-Replace-Animal-Models-/&utm_campaign=NEWSLETTER_TS_The-Scientist-Daily_2016&utm_source=hs_email&utm_medium=email&utm_content=31875517&_hsenc=p2ANqtz–oxiSCOos_CEwhT2sn82b4nSFXEz-L7tDJMUv2El_7zU4UzasYF-FZ36cs5Gti1xTpzEl63NjiLSM6m2tZ_ubMM275PA&_hsmi=31875517), dont la dernière : les organoïdes pourront-ils  remplacer les animaux de laboratoire ? Il convient donc de ne pas s’inquiéter, chaque étape fera toujours jaillir de nouvelles questions.