Le laboratoire et la vraie vie !

janvier 13th, 2025

Si l’espèce murine a beaucoup donné à la science depuis des décennies, il s’agit essentiellement de ceux que l’on appelle, les rats de laboratoire, issus d’une souche ou d’une lignée sélectionnée, élevée et reproduite à la demande des établissements d’expérimentation animale. Les utilisateurs étaient ainsi assurer d’une continuité telle que les résultats pouvaient être comparés entre les laboratoires qui s’adressaient à des lignées produites par sélection à partir de reproducteurs choisis par les éleveurs au sein d’élevages de rats  bruns, dont les premiers individus provenaient de l’espèce sauvage Rattus norvegicus. Pourtant on aurait également pu se souvenir du couple Ésope/ La Fontaine et qui avait bien différencier le rat des villes et le rat des champs. Car si le rat de laboratoire est un animal docile il ne possède pas certaines des caractéristiques de son parent sauvage, le Peromyscus. C’est chez ce dernier qu’il existe deux espèces particulières, le P. polionotus et le P. californicus. Elles sont toutes deux monogames (ce qui est exceptionnel chez les mammifères) construisent des nids d’une grande complexité et manifestent vis à vis de leur descendance un intérêt tout à fait particulier, digne des mammifères supérieurs voire de la gente humaine ! Ces qualités sont héréditaires et on a mis en évidence des régions génomiques (hypothalamiques) en rapport avec les différences comportementales. La paternité/maternité s’accompagne ainsi de modifications au niveau cellulaire, mais aussi au niveau tissulaire, au niveau physiologique et au niveau sensoriel. Ce qui permet d’effectuer des études comportementales d’une autre portée que celles attribuées aux rats de laboratoires élevés en batteries. Il est certain que la diversité qui existe dans ces populations la rapproche de celle des individus ce qui ne pouvait être le cas des études faites sur des populations rendues artificiellement homogènes (On a Wild Mouse Chase to Understand Parenting, Love, and Fear)!

Une mémoire d’oiseau !

décembre 31st, 2024

Pas certain que l’on aie pensé à associer mémoire d’oiseau et appétit d’oiseau. Pourtant l’observation d’un certain nombre d’entre eux démontre leur capacité à se nourrir lorsque bise et frimas règnent, tant leur mémoire leur permet de retrouver les caches de nourriture faites pendant les temps de plénitude alimentaire. Il en existe même deux groupes principaux selon qu’ils collectionnent ou dispersent leurs réserves, mais là n’est pas le propos, car ce qui interroge c’est leur aptitude à la mémorisation spatiale, ce qui peut sembler faire défaut à l’humain ( The Elephantine Memories of Food-Caching Birds, in The New Yorker Daily, Illustration ci-dessus). C’est cette apparente anomalie de la nature qui a poussé différents ornithologues à explorer cette extraordinaire faculté. Plusieurs corrélations sont à prendre en compte, sans que l’on puisse en affirmer la causalité. Il existe un rapport entre les oiseaux les plus performants en terme de mémoire et leur survie. Les femelles qui choisissent les males plus performants ont des pontes plus riches. Les hippocampes des individus les plus performants sont de taille supérieure ou possèdent plus de neurones, mais gènes et éducation se sont révélés impliqués conjointement et la sélection naturelle joue sa partition. En fait ce qui semble nouveau dans cette étude de la fonction mémorielle des oiseaux, c’est la différence que les auteurs pointent entre rigidité et adaptabilité : entre la capacité à utiliser le milieu où évolue le sujet et son incapacité à le faire ! On pourrait même imaginer qu’un homme ne pourrait jamais vivre avec une mémoire de mésange en raison d’un trop plein d’informations sans intérêt et ce d’autant plus qu’elles interdiraient la prise en compte d’autres informations ! On ne le dira jamais assez, la nature est décidemment bien faite !

Miroir, mon beau miroir !

décembre 29th, 2024

Parce que la fonction d’un miroir est de réfléchir, c’est aussi un parfait outil pour la réflexion ! Mais pour celui qui s’y mire les conséquences prennent des chemins totalement différents : la méchante reine décide d’éliminer Blanche Neige tandis que La Belle décide de retrouver la Bête. Il est aussi celui qui crée une image de même taille et de forme inversée ainsi l’image d’une main droite est-elle une main gauche, (propriété de chiralité) ce dont la Nature est particulièrement friande, comme l’ont constaté nombre d’observateurs depuis la nuit des temps. Toujours fidèle à son don d’imitation, l’homme réussit aujourd’hui  » à créer des versions miroirs de molécules naturelles » (Scientists warn against creating ‘mirror life’). La version ainsi créée de la molécule est tout simplement l’équivalent de l’image en miroir de la main (citée ci-dessus), de telle sorte que si la molécule native a une chiralité droite, la molécule créée a une chiralité gauche et inversement. Mais alors, ne se pourrait-il pas que ces molécules nouvelles adoptassent un comportement différent des molécules natives en rentrant en contact avec l’organisme vivant auquel elles sont destinées ? Problème d’autant plus prégnant, s’il s’agit de bactéries, de molécules thérapeutiques … L’optimiste aura tendance à voir un avenir brillant au monde miroir, tandis que le pessimiste verra l’inverse, ce qui est parfaitement normal au regard de la technique en cause. Une seule certitude, dans l’état actuel, il est impossible de répondre à la question !

Artificielle : jusqu’où ?

décembre 16th, 2024

Si l’on utilise le terme d’Intelligence artificielle, l’article Treat AI as you would want to be treated peut ne pas être inintéressant. Par contre parler d’automate numérique, élimine toute implication éthique dans la mesure où la référence est à l’évidence une machine. Ainsi le terme même d’intelligence est-il dès le départ connoté, l’intelligence étant plus aisément attribuée à l’être vivant qu’à un mécanisme totalement artificiel. C’est la raison pour laquelle selon le terme retenu, il peut sembler licite ou totalement illicite de se poser la question d’une éthique allant de paire avec le qualificatif d’artificielle. Peut-il y avoir ou non accession à une certaine conscience, acquisition d’expériences subjectives ? Si la réponse est affirmative, il est indispensable de mettre en place un environnement éthique adapté; Mais comme on peut s’en douter, la difficulté va être de pouvoir être « affirmatif » : comment est-on en mesure de détecter si l’Intelligence artificielle qui fait face sait se poser la question « Ai-je peur de la mort ? ». Comme le disent les auteurs de l’article « Il n’y a pas de mal à se poser la question » : et rien n’est répréhensible à le faire. Dans la mesure où c’est Isaac Asimov, et lui seul qui a édicté les lois de la robotique dans un autre temps, il n’est peut-être pas inutile de prendre les devants, le cadre s’étant considérablement modifié !

Rappel des trois lois d’Isaac Asimov 1)Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, laisser cet être humain exposé au danger ; 2)Un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la première loi ; 3)Un robot doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n’entre pas en contradiction avec la première ou la deuxième loi.

N’est pas végétarien qui veut !

décembre 12th, 2024

Être végétarien c’est adhérer à une certaine idée de vie, mais c’est aussi manifester une appétence réelle pour le règne végétal peut-être pas dans son ensemble mais néanmoins pour un certain nombre de ses représentants au nombre desquels les légumes. « Plante potagère dont certaines parties peuvent entrer dans l’alimentation humaine« , dont la liste est longue : légumes tiges, légumes feuilles, légumes fleurs, légumes racines, secs ou frais, ils participent à l’alimentation humaine depuis l’antiquité peut-on lire, en réalité depuis si longtemps que la date plonge dans la nuit des temps. Pourtant tous les individus ne sont pas égaux devant le règne végétal en terme d’élément de nourriture. Si on évoque l’importance de leur introduction dans l’alimentation du jeune enfant, il n’en reste pas moins vrai que l’adulte qu’il deviendra en sera plus ou moins friand. Aujourd’hui il convient de ne pas stigmatiser ceux qui se refusent à en absorber quelques uns car l’explication en est scientifique (Greens and Genes: The Bitter Truth Behind Your Veggie Preferences), donc sans appel …. , l’expérience gustative reposant « sur un mélange de facteurs génétiques et individuels« . Les récepteurs du goût sont de deux types, et c’est essentiellement les récepteurs sensibles à l’amertume, type 2, qui sont en cause. Ainsi est-il possible de distinguer des super goûteurs en fonction des copies du gène que possède l’individu considéré, ce qui se traduit par une différence dans le ressenti du légume que l’on mange. Mais mise à part l’explication rationnelle du rejet alimentaire, cette explication peut permettre un élargissement de la palette nutritive. Si l’on modifie le goût de certains légumes, on augmentera leur absorption et donc on améliorera la nutrition de la population humaine. Malheureusement on se heurte là encore à la peur que génère l’acronyme OGM. Tout espoir n’est pourtant pas perdu, puisque contourner le problème reste néanmoins possible : il suffit de faire ce que l’humanité a toujours pratiqué  » les méthodes de sélection traditionnelle » puis ajouter une touche de modernité et « appliquer le dépistage génétique pour identifier les mutants naturels« .

Intéressant ?

décembre 10th, 2024

N’importe quel jardinier sait qu’après la pluie ce peut être le beau temps, mais qu’un temps pluvieux est aussi le meilleur moment pour vérifier la qualité de sa terre en comptant les vers de terre qui sortent de leur repère. Le lombric en effet est considéré comme le meilleur ami des jardins : c’est un fidèle témoin de la bonne qualité du milieu dans lequel il évolue et qu’il aère comme on l’apprenait aux petits écoliers des décennies passées. Une question d’importance se pose néanmoins aux plus curieux : pourquoi les vers de terre sortent-ils pendant qu’il pleut à moins que d’imaginer qu’ils aiment patauger dans un terrain détrempé ! (Why do worms come out in the rain) ! Nombreuses et pertinentes sont les hypothèses soulevées par les spécialistes en géodrilologie, parmi lesquelles : leur crainte d’une noyade, la teneur en oxygène, un stimulus nociceptif (prédateur, pluie acide), le besoin d’un déplacement accéléré …. En fait quand on croise phénomène vibratoire et sortie des vers de terre, on s’aperçoit qu’il existe bel et bien un point d’intersection : certains oiseaux « vermiphages » tapent sur le sol de de telle sorte que les vers en sortant se font dévorer par ceux des oiseaux qui en sont amateurs. Il existe donc deux interprétations possibles : les oiseaux ont appris mais pas les vers de terre !! Pour mémoire, Frank Herbert devait être au courant de ce phénomène puisque les Fremen de Dune tapent sur le sol de façon rythmée pour en faire sortir les vers de sable avant de les chevaucher !

Début du naufrage ?

décembre 7th, 2024

C’est un processus dont on ne connait ni le début ni la fin, sous entendu, la date du début tout autant que celle de la fin. S’il pourrait être intéressant de connaitre la première, la seconde serait cause de controverses à l’infini. La devinette est donc « Qui suis-je ? ». Je suis un processus inhérent à tout système biologique, consubstantiel au règne animal dans sa totalité, allant de paire avec la propriété de se reproduire, quand bien même ma vitesse n’est pas la même pour tous ! C’est du vieillissement dont il est question ici. Si à l’instar des signes extérieurs de richesse, il existe des signes extérieurs de vieillissement auxquels chacun essaie plus ou moins de pallier, il serait bon en effet d’en reconnaitre les premières manifestations pour y pallier. Mais pour ce faire se pose LA question : comment savoir reconnaitre le début du dit processus ? C’est cette question que traite l’article What is ageing? Researchers don’t agree en s’attaquant au problème de base, qu’est-ce que le vieillissement ? Hélas, trois fois hélas, les spécialistes eux-mêmes ne sont pas d’accord. Pour certains il n’est pas possible de trancher entre deux visions du processus, entre maladie ou pas maladie, ce qui semble particulièrement curieux dans la mesure où il s’agit d’un mécanisme qui peut sembler normal dans la mesure où les cellules des animaux supérieurs n’ont pas la capacité de revenir spontanément et normalement à leur état primitif : l’autoréparation ne fait pas partie de leur bagage. Quant à son début, pour d’autres, il serait déjà en marche avant la conception puisqu’il pourrait toucher les cellules germinales en propre ! De même que l’âge canonique n’est pas synonyme d’âge très avancé, puisque étant défini par le droit canon il varie en fonction de l’individu considéré, de même le vieillissement varie-t-il avec ceux qui s’y intéressent. Mathusalem aurait vécu 969 ans mais la recette a été perdue et ceux qui s’y intéressent ne sont pas prêts de remettre la mais dessus !

Rire pour réfléchir !

novembre 24th, 2024

Personne n’ignore l’existence du Prix Nobel tant l’honneur qui s’y rapporte s’il revient en premier lieu à l’heureux récipiendaire, éclabousse également ses paires voire la nation dont il est issu. Créé en 1901 par Alfred Nobel, inventeur de la dynamite, la récompense s’adresse à cinq disciplines différentes à l’exception des mathématiques et ce pour des raisons assez évasives, sur lesquelles Alfred Nobel n’a jamais voulu apporter de précisions. Mais pour faire mentir le dicton « pas sérieux, s’abstenir », en 1991 Marc Abrahams, éditeur et cofondateur du magazine scientifique humoristique Annals of improbable Research crée le prix Ig-Nobel pour Ignobel, une récompense parodique de son prestigieux frère sus nommé. Il semble que les titres en soient volontairement transgressifs comme en témoigne l’article The ‘silly’ science prize changing careers (https://www.nature.com/articles/d41586-024-03756-w) : ainsi Les chauffeurs de taxi londoniens ont un plus gros hippocampe ou bien, Premier cas documenté de nécrophilie homosexuelle chez les canards. Si leur lecture montre qu’il s’agit bel et bien de travaux originaux, ils sont également et peut-être surtout le point de départ d’études ultérieures probablement en rapport avec un regard différent et exempt d’a priori castrateurs. Ainsi peut-on voir dans le rire le bouton qui déverrouille une situation, qui ouvre une porte sur un inattendu, un nouveau type de rupture épistémologique !

Homo ratus est homini !

novembre 16th, 2024

L’homme un rat de laboratoire (Why we are all lab rats in the digital world) ? Il convient de choisir le sens que l’on donne à l’expression, car le rat de laboratoire est un petit rongeur bien particulier de l’espèce des ratus novergicus, issu d’une lignée choisie et élevée à des fin d’expérimentation, quand par ailleurs le rat de laboratoire est celui qui passe sont temps confiné dans son lieu de travail. Qu’est donc « l’homme, rat de laboratoire » des auteurs ? Un sujet devenu objet d’expérimentation tel le ratus norvegicus dans la mesure où il ignore parfaitement son état puisqu’il y a été mis à son insu ! Il ne s’agit ni plus ni moins que de l’utilisation des « mega/giga data » accumulées au grès de l’utilisation des réseaux sociaux par tous ceux qui les parcourent. Quelle que soit le recherche, qu’il s’agisse d’un particulier, d’une entreprise, cette utilisation des données affecte tout autant les travailleurs indépendants que des équipes de scientifiques. « Il existe ainsi trois régimes possibles d’expérimentation – explicite, caché et illimité – qui ont reconfiguré l’autonomie » des consommateurs. Ainsi créer un compte est-il synonyme d’abandon des données personnelles au profit de … ? Si le monde scientifique est plus impliqué dans une démarche éthique, il n’en est pas nécessairement de même pour tous ceux qui se situent en dehors. C’est la raison pour laquelle la loi sur l’intelligence artificielle de l’Union européenne (https://www.cyberguru.it/fr/2024/05/06/loi-sur-lia-leurope-est-la-premiere-au-monde-a-reglementer-lintelligence-artificielle/?) est d’une réelle importance et constitue une avancée responsable dans l’encadrement de l’utilisation des données et des algorithmes générés. Encore un exemple d’un détournement par destination !

Pourquoi l’écriture ?

novembre 13th, 2024

Les peintures pariétales de la préhistoire sont loin d’avoir livrer tous leurs secrets. Pourquoi les représentations animales y sont-elles si merveilleuses et pourquoi celles de l’homme sont-elles rares et si éloignées de leurs modèles ? Quelle est la signification des mains pariétales amputées d’un ou de deux doigts ? A coup sûr, il ne s’agit pas d’amputations chirurgicales ni de malformations ! L’homme préhistorique a pourtant donné à l’image une signification que l’homme actuel est incapable de totalement déchiffrer. L’écriture en tant que telle est intervenue bien plus tard, en fait relativement récemment et la question se pose toujours d’en connaître le pourquoi et le comment. On imagine volontiers que dans la mesure où les échanges se sont complexifiés, les besoins économiques en sont l’origine. Échanger une vache contre cinq chèvres ne devait pas poser de problèmes, mais des céréales contre des poteries rendait l’opération plus délicate. C’est probablement dans ce sens que va l’étude concernant des signes graphiques rapportés au commerce en Mésopotamie (Cylinder symbols hint to origins of writing), c’était déjà l’hypothèse que soulevait L.J. Calvet dans son ouvrage, Histoire de l’écriture (HACHETTE, Littératures, 1996). Dans le cas des sceaux cylindriques étudiés, l’intérêt vient de ce que les signes relevés pourraient constituer une étape antérieure à l’écriture cunéiforme, méritant donc le qualificatif de proto cunéiforme. Cette « première ébauche » d’écriture se situerait environ quatre mille quatre cents ans av. J.-C, soit mille ans avant l’écriture elle même, quand l’Iliade et l’Odyssée homériques dateraient du sixième siècle av. J.-C. Même s’il reste des interrogations sur l’interprétation de certains signes, il n’en reste pas moins vrai que la vie économique a du être un facteur puissant dans l’apparition de l’écriture et dans le passage du symbole au mot porteur de sa signification !