Archive for mars, 2012

Et un raton laveur !

samedi, mars 31st, 2012

Le microbiome fait-il partie de l’environnement ou doit-il être compris comme faisant partie de l’homme (Who Are We Really? |http://the-scientist.com/2012/03/01/who-are-we-really/) ? Vaste et troublante question puisqu’elle sous tendrait une approche tout à fait nouvelle de l’humain. Mais qu’est-ce que le « microbiome ». Il s’agit d’un concept récent venu des USA où le NIH a éloboré un projet scientifique destiné à recenser l’ensemble des génes et génomes vivant chez  tout être, des commensaux qui ne seraient plus nos commensaux ! Ainsi en Mars 2012, se tenait sous l’égide de l’Unesco, un congrès sur ce sujet. Pourquoi une nouvelle définition de l’homme qui viendrait s’ajouter à toutes les définitions précédentes ? Toute manipulation introduisant, de façon durable une modification du patrimoine génétique est interdite au nom de l’éthique. Si le microbiome fait partie de l’homme, alors toute manipulation à son égard peut rentrer dans le cadre de la manipulation génétique et ce d’autant plus que l’on ne possède aucune information sur le devenir de cette modification. Vient s’ajouter le concept de signature individuelle, un peu comparable aux empreintes digitales : les communeautés bactériennes cutanées pourraient être spécifiques d’un individu (Forensic identification using skin bacterial communities, http://www.pnas.org/content/early/2010/03/01/1000162107.full.pdf+html). Comme d’un autre côté, des modifications ciblées de ce même microbiome pourraient à terme  être bénéfiques à la santé, on aurait envie que notre microbiome ne fasse pas partie de nous ! Est-ce l’impasse, l’aporie des philosophes ? En tout cas, il convient de répéter que poser une question ne signifie pas qu’on en ait nécessairement la réponse !

Méfiance

vendredi, mars 30th, 2012

« One drug to shrink all tumors » (http://news.sciencemag.org/sciencenow/2012/03/one-drug-to-shrink-all-tumors.html?ref=hp) ? Faut-il y croire mais aussi peut-on y croire ? Cette drogue unique c’est un anticorps (l’anti CD 47), dirigé contre une protéine membranaire exprimée normalement, mais aussi et pourrait-on dire surtout, surexprimée dans différents cas de néoplasies. Son rôle se comprend par le nom qui lui a été donné « do not eat ». Elle agirait en fait comme un signal empêchant le système immunitaire de s’attaquer aux cellules cancéreuses. L’anticorps développé contre cette protéine permettrait au système immunitaire de détruire des cellules non protégées. Bien sûr, serait-il bon de dire, l’expérimentation a été conduite sur des souris chez lesquelles des tumeurs humaines ont été greffées. Donc il ne suffit plus que de valider l’analogie de résultats chez l’homme puisque ceux-ci sont prometteurs chez la souris. Néanmoins comme le font souligner les auteurs de l’étude, le micro-environement d’une tumeur greffée n’est pas comparable au macro-environnement d’une tumeur in situ, et qu’en sera-t-il de l’effet conjugué de l’anticorps avec les autres thérapeutiques délivrées simultanément, l’anticorps anti CD 47 ne pouvant être utilisé dans un premier temps que comme adjuvant. On reste surtout perplexe quant à l’attitude à adopter devant un titre aussi absolu quand dans un autre article tout aussi récent on démontre qu’une (autre) molécule bien connue comme immunosupresseur entraine comme effet secondaire une insulino résistance (Study explains how rapamycin also causes insulin resistance, http://www.news-medical.net/news/20120330/Study-explains-how-rapamycin-also-causes-insulin-resistance.aspx). Les exemples sont nombreux de ces interactions délétères mises progressivement à jour, détruisant pour partie les bénéfices attendus et les espoirs mis en eux. C’est pourquoi on devrait toujours se méfier de titres manifestement trop « racoleurs »  !

Souris un jour, souris toujours !

mardi, mars 27th, 2012

La souris ne finira jamais de nous étonner, on peut en effet relever en l’espace de deux semaines quatre articles qui ont pour sujet d’expérience ce charmant petit animal. Deux d’entre eux traitent du domaine des souvenirs, un autre du rapport possible entre la longévité et une classe de protéines du type des Sirtuines, le dernier de la création d’un avatar. En ce qui concerne les études portant sur la mémoire en général, on peut craindre le pire si la transposition à l’homme se matérialise. Qu’on en juge : empêcher la formation de souvenirs par l’utilisation de souvenirs antérieurs (Old Memories Excavated | http://the-scientist.com/2012/03/26/old-memories-), créer de faux souvenirs ( False memories generated in lab mice,http://www.newscientist.com/article/dn21621-false-memories-generated-in-lab-mice.html). Le troisième article envisage le rôle d’une classe d’enzymes, les Sirtuines impliquées dans le vieillissement (Mouse proteins may hold secret to longer human life, http://thetartan.org/2012/3/26/scitech/longevity), ce qui pourrait être intéressant, à condition que l’on n’oublie pas qu’il s’agit de faire reculer la mort pas de la faire disparaitre. Par contre, l’avatar est le plus réconfortant, apprendre à traiter les tumeurs humaines à partir de tumeurs greffées ( Mouse Made For You, http://the-scientist.com/2012/03/23/mouse-made-for-you/). Il n’en reste pas moins vrai que ces expérimentations en induisant une réification de l’animal pour les besoins de l’homme, pourraient conduire à une réification de l’humain à moins que l’on parvienne à obtenir explicitement l’assentiment de ladite souris !

L’immunologie « urbi et orbi »

mardi, mars 27th, 2012

Plusieurs articles ont récemment et simultanément traité du vaste domaine de l’immunologie : une revue complète sur « Immunologie et cancer » ( http://www.nature.com/nrc/journal/v12/n4/full/nrc3251.html?WT.ec_id=NRC-201204), un article plus général au titre provocateur « Laissez les manger sale » (Let Them Eat Dirt | The Scientist,http://the-scientist.com/2012/03/22/let-them-eat-dirt/ ) (www.lymphozyten.de).  On ne parlera jamais assez de l’implication de l’Immunologie dans la survie des êtres vivants qu’il s’agisse d’une action bénéfique aussi bien que délétère. En effet il semble bien aux vues des résultats d’études récentes, que l’exposition précoce aux germes pathogènes diminuerait le risque ultérieur d’au moins deux des maladies auto-immunes humaines affectant l’une l’appareil respiratoire, l’autre l’appareil digestif . L’immunité serait en soi un phénomène très ancien, innée chez les invertébrés et adaptative à partir des premiers vertébrés. Evoquée dès la Grèce Antique, convenablement utilisée par Jenner, elle se révèle aujourdhui d’une complexité totale en raison de l’abondance des facteurs mis en cause et de la multiplicité de ses modes d’expression. Mais quelle peut bien être la raison qui a fait que l’homme a accolé au nom de ce système le concept de conservation du soi ? Alors qu’ il avait déjà à naviguer avec un ça, un moi, un sur moi, un premier soi, il s’en autorisait un second ! (Illustration by Janusz Giniewski: http://www.illus.jimdo.com)

Une très brève et très incomplète histoire de l’histologie européenne

samedi, mars 24th, 2012

A part le fait de voir en couleur plutôt qu’en noir et blanc, existe-til une réelle différence entre les deux clichés ci dessous que 100 ans séparent ?  L’une et l’autre de ces deux techniques dévoilent des neurones tels qu’ils apparurent à Camillo Golgi dés la fin du XIXème siècle. C’est grâce à cette technique (imprégnation argentique, virage au chlorure d’or) que Ramon y Cajal put établir que les neurones étaient en contiguïté et non en continuité. Il s’agissait d’une avancée majeure indispensable aux études ultérieures sur le tissu nerveux, ces deux médecins partageant du reste le prix Nobel de Médecine en 1906. Golgi était interne en psychiatrie, Cajal se destinait à une carrière artistique (Nervy Production |
http://the-scientist.com/2012/03/23/nervy-production/). L’un et l’autre ont réalisé leurs objectifs en empruntant des chemins de traverses : mise au point d’une technique innovante pour celui qui pensait que l’étude des maladies mentales passait par l’étude du tissu nerveux, confirmation pour l’autre que dans l’art de la médecine il peut y avoir de l’art « tout court ».

 

Champ lexical

dimanche, mars 18th, 2012

Pour les élèves d’une 5ème des collèges, un champ lexical,  « ensemble de mots ou d’expressions qui relèvent d’une même notion, d’un même thème », ne participe pas toujours d’une évidence. Pour le cerveau humain, la compétition lexicale est monnaie courante et permet à l’écoute d’un unique premier phonème de choisir le bon mot grâce à ce mécanisme (Temporal Predictive Codes for Spoken Words in Auditory Cortex, http://www.mrc-cbu.cam.ac.uk/people/matt.davis/pubs/gagnepain_current_biology_inpress.pdf). Le cortex temporal serait à même d’assortir entre eux des mots de telle sorte qu’ils s’excluent mutuellement jusqu’à l’obtention du mot exact. Il est bon de rappeler, même si chacun a pu vivre cette expérience, que ce choix est non seulement dans la majorité des cas le bon, mais aussi qu’il est obtenu en un temps particulièrement court. Ce n’est ni plus moins que le concept de l’écriture intuitive vieille de trente ans, mais qui n’a pu prendre son essort qu’avec l’envol de la téléphonie mobile et la pratique des SMS. Qui n’a pas expérimenté cette fonction ne sait pas combien il est indispensable de vérifier ce qui s’inscrit sur le clavier en l’absence de quoi le sens du message pourra avoir totalement disparu. Pour résumer : l’homme se copie lui-même, mais la copie reste moins fiable que l’original, quelle chance !

Une camera « moléculaire »

vendredi, mars 16th, 2012

Ne retenons d’A. Carrel qu’une carrière de chirurgien chercheur qui lui valu le Prix Nobel en 1912. Au début du XXème siècle il  introduisit dans le monde scientifique deux idées : la première qui devait se révéler fausse, le mythe de l’immortalité cellulaire, la seconde qui avait un bel avenir devant elle, une  biologie dynamique. Jusqu’à cette époque si le statique avait seul droit de cité c’était en raison  du manque de moyens techniques, mais l’apparition du cinématographe devait marquer la naissance d’un rapprochement entre la « réalité de la cellule » et son observateur. Cette « promiscuité » a atteint aujourd’hui un seuil dans le temps, la femtoseconde, et dans l’espace, l’angstrom, dont  on prend difficilement conscience (Next Generation: A Molecular Camera |
http://the-scientist.com/2012/03/14/next-generation-a-). On est passé de l’étude du mouvement de la cellule à l’étude du mouvement de la molécule ! Et comme toute réaction chimique s’accompagne de mouvements des atomes, on pourrait « voir » ce qui se passe quand une protéine se replie ou quand l’ADN est endommagé. Ainsi se « dévoilerait »  le cheminement du processus et probablement une meilleure appréhension du résultat final, sur lequel il n’est pas impossible d’imaginer ensuite que l’on pourrait agir. Si l’on n’a pas encore atteint cette vision pour des molécules complexes, on s’est néanmoins considérablement éloigné de la berge dont on est parti !

Cocorico !

jeudi, mars 15th, 2012

Réjouissons nous des lauriers qui aujourd’hui ornent le front de David Sabatini (David Sabatini: Demystifying mTOR |(http://the-scientist.com/2012/03/01/david-sabatini). Il se pourrait que la John Hopkins University soit en passe de reconnaître les vertus de la « rupture épistémologique » ! Non seulement le directeur d’un laboratoire de neurosciences était prêt à ce qu’un étudiant puisse choisir son sujet de recherche, mais encore le-dit directeur acceptait que le sujet choisi ne figurât point dans les thèmes à l’honneur dans son laboratoire ! Moyennant quoi, ayant suivi suivi son chemin en dehors des sentiers battus, David Sabatini, encore inconnu du grand pulic mais reconnu de ses pairs, est devenu Associate Professor dans le Department of Biology du Massachusetts Institute of Technology. Dans son laboratoire les recherches se poursuivent sur le sujet qu’il avait choisi, mais l’histoire ne dit pas encore s’il a déjà ou acceptera plus tard qu’un étudiant de son équipe en fasse son mentor dans la rupture et non dans une aveugle continuité. Le mentor n’est-il pas là pour être dépassé ?

Nos amis les animaux

vendredi, mars 9th, 2012

Quoi de commun entre la souris, le gorille des plaines occidentales et le cheval ? Il ne s’agit en aucun cas d’un inventaire à la Prevert, mais de trois sujets d’articles parus simultanément (http://www.scientificamerican.com/article.cfm?id=depression-how-depressed-is-mouse
http://www.latimes.com/news/science/la-sci-gorilla-genome-20120308,0,6590478.story
http://wamu.org/news/12/03/07/virginia_tech_researchers_study_asthma_using_horses) . On pourrait du reste se poser la question de savoir s’il y a un message particulier des rédacteurs dans cette simultanéité ? S’il s’avère un jour que Noé sauva bien une espèce de chacun d’entre eux, ils n’ont pas fini de nous en remercier. La souris accepte volontiers une nage forcée, une suspension par la queue, et une boisson sucrée. Le gorille, moins impliqué physiquement nous offre de comparer son ADN avec le nôtre et se faisant nous ouvre plusieurs voies de recherche sur nos origines ainsi que l’étude comparée de gènes communs devenus délétères chez l’homme. Enfin le cheval asthmatique offre des « pintes » de son sang aux tests à visée thérapeutique. Défions nous néanmoins d’invoquer ces raisons dans nos discours sur la protection animale !

Epigénétique

mercredi, mars 7th, 2012

Depuis la mise en service du concept d’épigénétisme et sans en savoir encore tout aujourd’hui, on n’en imagine pas moins le rôle important joué (de façon schématique) par l’environnement. Cette vulgate se trouve confirmée par le rôle que joue l’exercice musculaire sur la méthylation de l’ADN (Exercise Alters Epigenetics |
http://the-scientist.com/2012/03/06/exercise-alters-). Certains des génes impliqués dans le transport du glucose et la régulation mitochondriale seraient moins représentés chez les individus souffrant d’un diabète de type 2, ce qui expliquerait la diminution de leur réponse à l’insuline. C’est pourquoi dans ces conditions, l’exercice musculaire pourrait être considéré comme une thérapeutique à la fois « simple » et adaptée. Malheureusement, l’effet est de courte durée et l’exercice devrait être reproduit de façon itérative ce qui pourrait aussi conduire à un emballement  du système ! Dernière minute : on devrait ajouter l’article suivant :

Why Exercise Works

A novel hormone released from skeletal muscle during exercise acts on white
adipose tissue to convert it into brown-like adipocytes, which are known to be
important for thermogenesis — explaining in part the benefit of exercise on
whole body metabolism.
Boström et al.
Nature. 2012 Jan 26; 48:463-8