Définition du Littré pour image : “Ce qui imite, ce qui ressemble, ressemblance (sens propre du latin imago)”. Comment qualifier alors l’image du Pape François, vêtu d’une élégante doudoune blanche, ayant enchanté dernièrement les réseaux sociaux ? Chercher l’erreur est une démarche difficile puisqu’il faut envisager deux façons d’aborder l’image. Puisqu’elle est “imitation, ressemblance”, elle n’est pas fausse et pourtant dans le même temps, elle l’est. Il s’agit bien du Pape François et rien n’interdit qu’il ait pu porter le vêtement incriminé. De nombreuses œuvres d’art représentent des personnages dont l’existence est prouvée mais dont les représentations ont été modifiées par l’artiste sans que l’on crie au scandale, sans que l’on aborde le thème de l’information mensongère. De même existe-t-il des pastiches célèbres dont on saisit fort bien qu’il s’agit “d’une imitation du style d’un auteur ou artiste, mais qui ne vise pas le plagiat”. Il y a donc dans l’image susdite une intention absente des deux exemples cités, celle de tromper volontairement. Aujourd’hui les outils techniques sont à ce point performants que toute image, tout discours, demande à être “testé”. La société se penche donc sur les moyens qui lui permettront de déjouer la tromperie, et il en existe. Mais comme le fait remarquer l’article “How to stop AI deepfakes from sinking society — and science“, la question à laquelle il faudrait pouvoir répondre n’est pas “comment” mais “pourquoi“. Car il s’agit bel et bien là, d’un double symptôme sociétal : la volonté de nuire du côté de l’auteur qui repose sur l’absence d’esprit critique de la part de celui auquel il s’adresse. En cause, l’absence de toute notion d’éthique, aussi bien de responsabilité que de conviction de la part du premier et la méconnaissance de la gestion de la temporalité pour le second. Les outils de détection pour déjouer la falsification ne résoudront pas les insuffisances dont souffre la société actuelle.
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Fausse image
dimanche, octobre 1st, 2023L’homme est naturellement sociable
lundi, juin 5th, 2023Deux grandes idées s’affrontent depuis que l’homme est sujet de réflexion. Pour les uns, c’est un être sociable, pour les autres, c’est un redoutable prédateur à commencer par son voisin, homme lui-même. Les exemples des deux positions abondent et n’ont pas fait avancer la discussion jusqu’à aujourd’hui. Il se pourrait que la participation des biologistes de l’évolution aide les belligérants à la fois sur le sujet mais également sur d’autres qui leur seraient contingents. Il s’agit du séquençage de seize familles de primates (https://www.nature.com/articles/d41586-023-01776-6?utm_source=NatBiggest%20ever%20study%20of%20primate%20genomesure) . Ainsi la comparaison des génomes de singes “sociaux” avec le génome de singes “moins sociaux” met en évidence l’existence de gènes qui seraient liés à la taille des structures sociales. Ces changements auraient partie liée avec des neurohormones cérébrales, la dopamine et l’ocytocine. Or il vient d’être montré que l’ocytocine n’est pas indispensable chez les campagnols des prairies pour qu’ils forment des liens sociaux normaux. En effet ces derniers sont dépourvus de récepteurs à ocytocine ce qui ne les empêche nullement de former un couple stable (https://www.the-scientist.com/news-opinion/monogamous-rodents-dont-need-love-molecule-to-pair-up-70924) ! Il est évident que le Microtus, campagnol des prairies n’est pas un Rhinopithecus roxellana, singe doré, de même que ni l’un ni l’autre ne sont des homines sapientes ! Comme d’habitude, c’est à dire depuis très longtemps, les résultats de travaux obtenus chez l’animal doivent être regardés avec circonspection avant que d’être appliqués à l’homme selon un raisonnement fondé sur l’analogie. Néanmoins ils ont le mérite de donner des pistes de réflexion.
“Infodémie”
jeudi, novembre 12th, 2020Le 2 février dernier Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, crée un néologisme, le mot “infodémie“. Néologisme certes, mais bâti sur le modèle du mot valise : dans le cas présent à partir de information et de pandémie. Il en est question dans l’article To counter conspiracy theories, boost well-being et permet d’interroger la position du néologisme dans sa dimension temporelle. Le néologisme s’inscrit dans les mouvement d’une langue que l’on peut constater par exemple entre deux générations. L’apparition d’un nouveau mot fut longtemps contestée par les linguistes puristes même s’il pouvait se substituer à un mot préexistant. Dans le cas présent il n’en est rien : ce mot ne remplace rien, il est le reflet d’une nouvelle société dans laquelle des myriades d’informations relatives à un état sanitaire viennent se heurter les unes aux autres dans un présent qui interdit la réflexion. Selon L. Guilbert (Théorie du néologisme, https://www.persee.fr/doc/caief_0571-5865_1973_num_25_1_1020) il existerait plusieurs types de néologisme et infodémie appartiendrait au suivant : ” La création du néologisme ne peut être dissociée du discours tenu par le créateur-individu intégré à une communauté, s’exprimant dans une situation donnée“. Le ton est donné : c’est essentiellement la situation qui est en cause : la situation sanitaire, la situation des informations portées par la technique. Dans ces conditions quel peut être le futur du mot ? Peut-il disparaître ou au contraire s’installer définitivement ? La technique peut-elle remédier à ce qu’elle a permis ?
Anachorète
lundi, juillet 20th, 2020L’anachorète est un ermite et la solitude qu’il a volontairement choisie le différencie du cénobite qui partage sa solitude avec un groupe qu’il a reconstruit. Il est à parier que les expériences vécues par le premier diffèrent largement de celles vécues par le second. Si l’on ne connaît rien du vécu d’Antoine le Grand qui se retira treize ans enfermé dans un des anciens tombeaux égyptiens de la montagne on en sait plus sur le vécu de Michel Siffre enfermé dans une grotte au Texas pendant plus de six mois, qui selon ses dires “aurait été tenté au bout de cinq mois de se lier d’amitié avec une souris”, sans résultat, faut-il le préciser ! On sait par ailleurs que la cellule disciplinaire est une option à visée punitive où l’isolement est limité dans le temps. Il est certain que les mesures de confinement prises récemment de par le monde s’apparentent dans une certaine mesure au différentes expériences d’isolement rapportées ci-dessus même si la décision et les conditions ne sont pas totalement comparables aux situations évoquées plus haut. Elles font néanmoins l’objet d’études comportementales car il y aura un après qu’il était impossible d’évaluer lors de la prise décisionnelle (How Social Isolation Affects the Brain, https://www.the-scientist.com/features/how-social-isolation-affects-the-brain-67701?utm_campaign=TS_DAILY%20NEWSLETTER_2020&utm_medium=email&_hsmi=91419245&_hsenc=p2ANqtz-9ZQcct3TsSUMkldBavv0z98nwBSM9T411Bl35IeLa6pdoBDdwPo7ZyY4EwQ5RdmIW0KKhxeiKpQbaYLe3Sog0lPQE38w&utm_content=91419245&utm_source=hs_email). Ce qui est particulièrement paradoxal dans cet état de fait c’est la connaissance des méfaits de l’isolement sur la santé et le choix d’un isolement à visée thérapeutique en imaginant une rupture de la chaîne de contamination. Il s’agit d’un véritable cas d’école concernant la prise décisionnelle. En effet dans un climat de méconnaissance totale du responsable d’une pandémie, a été prise une décision dont les effets néfastes étaient connus. Les termes de la comparaison qui ont présidé à ce choix pourraient sembler inadaptés, et on peut se demander de quel type de balance on est en droit de se servir. Mais en fait le débat ne fait que s’inscrire dans le domaine de la philosophie de l’action.
Preuves à l’appui
jeudi, septembre 13th, 2018L’anthropométrie ne connut pas que des heures glorieuses, la phrénologie en est un exemple patent. Basée dés le XVIII° siècle sur la théorie du neurologue autrichien Franz Joseph Gall, elle répond au concept selon lequel aux multiples fonctions cérébrales correspondent des zones cérébrales différenciées. Sur le papier le plan était fort beau mais l’enthousiasme aidant et l’inaltérable besoin humain de trouver une explication à chaque chose, firent que des chemins de traverse ne se firent pas attendre comme celui dévolu à l’anthropométrie criminelle selon Eugène Vidocq mais aussi pour prendre une très mauvaise direction comme celle mise au service des théories nazies. Plus glorieuse fut l’application qu’en fit Bertillon reposant sur l’utilisation de nombreux facteurs, mensurations, particularités physiques auxquelles vint s’ajouter plus tard la dactyloscopie. Dans leurs enquêtes policières les pédiatres furent grandement aidés lorsque fut mise au point la détermination radiologique de l’âge osseux. Sa connaissance s’avérait en effet indispensable par exemple au regard de possibles anomalies de croissance. Ainsi l’anthropométrie était-elle particulièrement compétente dans deux domaines l’un judiciaire, l’autre médical. Aujourd’hui cette détection radiologique vient de laisser sa place à une autre méthode probablement plus exacte, basée sur la méthylation de l’ADN et relevant du domaine de l’épigénétique (étude des changements d’activité des gènes — donc des changements de caractères — qui sont transmis au fil des divisions cellulaires ou des générations, sans faire appel à des mutations de l’ADN). Mais étant donnée la modification des flux migratoires, la détection de l’âge osseux s’est déplacée du domaine médical vers le domaine sociétal du fait de l’importance de l’âge des jeunes demandeurs d’asile (Molecular test of age highlights difficult questions, http://www.nature.com/articles/d41586-018-06165-y?WT.ec_id=NATURE-20180906&utm_source=nature_etoc&utm_medium=email&utm_campaign=20180906&spMailingID=57316706&spUserID=MTUyNTcxOTczMTcwS0&spJobID=1480796497&spReportId=MTQ4MDc5NjQ5NwS2, Can epigenetics help verify the age claims of refugees?, https://www.nature.com/articles/d41586-018-06121-w). Si cette nouvelle technique consiste en une amélioration dans le domaine du diagnostic médical il n’en reste pas moins que son intrusion dans le domaine politique l’implique différemment. Quand au fil des temps, on se souvient combien médecine et politique ont fait plus que flirter, il n’est pas inutile de faire preuve d’une vigilance sans faille dans les domaines d’utilisation de cette avancée technique. Ce ne serait pas la première fois que l’utilisateur détournerait un outil de sa fonction initiale dans un but peu recommandable !
Eloge des loisirs
mercredi, juillet 4th, 2018Il ne faut pas confondre l’Eloge de la paresse avec l’Eloge des loisirs car dans le cas présent, il n’est aucunement question de ne rien faire mais au contraire d’être très occupé et peut-on même ajouter particulièrement occupé ! (How a hobby can boost researchers’ productivity and creativity, http://www.nature.com/articles/d41586-018-05449-7?WT.ec_id=NATURE-20180621&utm_source=nature_etoc&utm_medium=email&utm_campaign=20180621&spMailingID=56851658&spUserID=MTUyNTcxOTczMTcwS0&spJobID=1422975329&spReportId=MTQyMjk3NTMyOQS2). Mais comment est-ce donc possible ? Par quel(s) merveilleux mécanisme(s) une occupation qui serait a priori dénuée de toute utilité serait a posteriori d’une grande utilité ! Mais dénué d’utilité a-t-il la même signification qu’inutile ! Ce qui oppose ces deux termes c’est leur aboutissement potentiel. Dans le premier cas il y une absence de finalité, dans le second une finalité qu’il convient d’éviter. Ainsi l’expérience montre-t-elle que le fait de s’adonner avec ferveur à des loisirs aussi multiples que variés est porteur d’une finalité incomparable, celle d’optimiser l’autre versant de l’activité humaine, les champs “illimitées” de sa réflexion. Des enjeux qui n’ont rien à voir avec ceux que requiert la société permettent à l’individu d’exercer tous ses sens vers leur amélioration. Ainsi seront affuter les outils indispensables à ses activités ultérieures. Et peut-être a-t-on trouvé là le coeur de la serendipité dont il a déjà été question. Mais ce passage de la gestion des loisirs personnels à la gestion du labeur au sein de la société ouvre aussi une fenêtre sur le concept de la flexibilité cognitive (https://www.persee.fr/doc/psy_0003-5033_2006_num_106_3_30923) dont les neurosciences sont particulièrement friandes.
Pourquoi s’en priver ?
mercredi, août 17th, 2016Une bonne nouvelle à laquelle on ne s’attendait pas forcément en cette époque qui vit quelques soubresauts sociétaux. Il pourrait exister une certaine forme de rapport entre la monogamie et l’altruisme, mais attention un altruisme de parentèle, ce qui en réduit quand même considérablement le concept (Opinion: Monogamy and Cooperation Are Connected Through Multiple Links, http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/46608/title/Opinion–Monogamy-and-Cooperation-Are-Connected-Through-Multiple-Links/&utm_campaign=NEWSLETTER_TS_The-Scientist-Daily_2016&utm_source=hs_email&utm_medium=email&utm_content=32676569&_hsenc=p2ANqtz80r72wkuJdtwJvClb4J4EWv1AdnW4GixDpRdaKWEg58mEMns8RnvR5VOML4pU1UUB416P55d3XsEhYGNQQpMWSRRPaKw&_hsmi=32676569) ! L’idée, née en 1964, est due à William Donald Hamilton et c’est pour sa théorie de la sélection de parentèle, qu’il a reçu la médaille Darwin en 1988 attribuée pour des recherches effectuées dans un domaine de biologie exploré par l’auteur éponyme. Abondamment représentée dans le monde animal comme chez le loup aussi bien que l’abeille …, cette théorie démontre que l’altruisme augmente avec l’apparentement sous l’effet de la sélection naturelle ce qui permet de comprendre la sentence, Homo homini lupus …. (selon Plaute copié par Hobbes) de la façon suivante : l’homme est un loup pour l’homme lorsqu’il ne le connait pas. L’homo politicus l’a si bien compris qu’il peut être apparenté à un autre parti politique que le sien dans un but, oh combien altruiste, de pouvoir être élu sans vraiment appartenir au groupe choisi !
Il y a évolution et évolution …. (suite)
dimanche, août 7th, 2016Donc l’évolution humaine ne s’est ni interrompue ni arrêtée (cf article précédent) à l’inverse d’un certains nombres de civilisations qui ont bel et bien disparu (Sumériens, Olmèques, Étrusques… Huit civilisations perdues, http://www.lepoint.fr/culture/sumeriens-olmeques-etrusques-huit-civilisations-perdues-05-08-2016-2059224_3.php). L’humanité a ainsi pu réaliser un certain nombre de ses rêves, voler sans se brûler les ailes (Icare), échapper aux pièges marins (Ulysse), alunir (Savinien de Cyrano de Bergerac) et l’on pourrait donc penser que le génie de l’homme est sans limite. Le génie, peut-être, mais de quel génie parle-t-on ? Pour les latins, chaque homme était accompagné de son génie propre, ” qui veillait sur lui dès sa naissance, qui partageait toute sa destinée et disparaissait avec lui“. Il se pourrait bien que de vieux génies soient encore à l’oeuvre auprès de chacun (Opinion: Our Inner Caveman, http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/46607/title/Opinion–Our-Inner-Caveman/&utm_campaign=NEWSLETTER_TS_The-Scientist-Daily_2016&utm_source=hs_email&utm_medium=email&utm_content=32489515&_hsenc=p2ANqtz-_KfLFH6Uyc5qa5jUxx0kVMpy96nCHAind-IePabWKeX7YIGHtfX_I7cLFUix4jR-hSRpaWgXAqjGCjJJ3YcuoAeUQjZQ&_hsmi=32489515). En effet tout homme, aussi bien intégré qu’il soit dans la société, garderait en lui un instinct tribal : celui de se protéger. La raison pour laquelle on qualifie ce caractère de tribal tient au fait que cette protection ne s’inscrit pas dans un futur éloigné mais dans un futur proche ce qui correspond bien à l’instinct de survie développé par les groupes humains ancestraux. C’est pourquoi il faut raisonner pour dépasser cette immédiateté personnelle quelque soit le domaine considéré, car il s’agit d’un réel moyen de pression, car il est certain que vivre en acceptant l’autre tout en refusant le grégarisme n’est pas chose simple ! Mais peut-être est-ce cette évolution qu’il faut avoir en ligne de mire !
Nouveau gendarme
mardi, mai 17th, 2016Comment “hacker les hackeurs“, ou comment opposer la virtualité d’une mise en ligne de l’information à la virtualité de son détournement. On pourrait dire que sans propriété il n’y a pas de vol d’où la célèbre formule “la propriété c’est le vol “. Un nouveau domaine est venu s’ajouter à tous les précédents, de ceux qui appartenaient en propre à la matérialité, celui de la virtualité dans laquelle il apparaît qu’il est tout aussi facile de se mouvoir. Les serrures les plus sophistiquées peuvent être apposées aux portes les plus appropriées, il n’en reste pas moins vrai qu’avec le temps, seules peu d’entre elles demeurent inviolables. Qu’en est-il des données informatiques, de celles qui voyagent sans qu’il puisse être tenu compte d’une quelconque distance, d’une quelconque frontière ? Aucune abri possible aussi bien pour le particulier que pour l’état et l’on pourrait même dire qu’il existe plusieurs niveaux du vol : de particulier à particulier (PAP !), de particulier à état (PAE), d’état à état (EAE). Mais quelque soit le niveau envisagé, les systèmes de protection se doivent d’être performants et aujourd’hui doivent dépasser le simple stade des logiciels de sécurité informatique. C’est, ni plus ni moins le sujet de l’article : How to hack the hackers: The human side of cybercrime (http://www.nature.com/news/how-to-hack-the-hackers-the-human-side-of-cybercrime-1.19872) où l’on passe par l’étude de l’individu pour envisager la société, faisant intervenir sciences économiques et comportementales dans le but d’une cyber sécurité. Malheureusement il y aurait de quoi s’inquiéter puisque les pirates auraient une très large avance sur leurs cibles. D’où l’idée que les processus de défense ne doivent plus passer par des murs de nature numériques mais par une étude du comportement de la société pour y détecter les erreurs humaines et y pallier, sans oublier au delà de ces murs, l’impact de l’économie souterraine engendré par ces actes de piraterie. On ne saurait trop recommander au lecteur de prendre le temps de lire la totalité des textes qui se terminent par l’option “accepter“, on ne saurait trop lui recommander de prendre le temps de faire le jeu du mot de passe ! Mais attention aux changements répétitifs de ce dernier, car il existe psychologiquement une graduation dans la difficulté de leur choix et ce n’est peut-être pas LA solution !
Ce n’est peut-être pas vraiment étonnant !
jeudi, mai 5th, 2016Un article récent, The Social Origins of Sustained Attention in One-Year-Old Human Infants (http://www.cell.com/current-biology/fulltext/S0960-9822(16)30202-0), aborde par une de ses faces, un thème général largement et longuement débattu ; que l’on se réfère en particulier à l’opposition maintes fois commentée qui agite depuis le siècle des lumières les rousseauistes et les voltairiens. Il ne s’agit ni plus ni moins que de l’implication de la société dans la construction de l’individu. Ce n’est pas s’éloigner de cette question que de constater curieusement qu’il existe deux versions concernant l’enfant élevé en dehors de la société humaine : une mythologie de l’enfant élevé par la gente animale qui se révèle différente des cas (parfois contestables) d’enfants dits sauvages. Dans le premier cas, il s’agit plus volontiers de personnages héroïques voire de Dieux de l’antiquité tels Zeus élevé par la chèvre Amalthée, ou Romulus et Remus élevés par une louve, ce qui se rapproche également du thème de Mowgli dans le Livre de la Jungle. Dans le second cas, l’enfant est loin de se réaliser en tant qu’individu, il est qualifié de “sauvage”. D’où l’on pourrait émettre l’hypothèse selon laquelle la société animalière permettrait à l’homme d’acquérir sa part d’humanité, ce que livré à lui-même il serait incapable de réaliser. Dans l’article cité ci dessus, l’étude porte sur une population d’enfants âgés d’environ 12 mois soumis à différents tests centrés sur le problème de l’attention dont l’expression passe par l’activité manuelle et les manifestations faciales, les tests étant pratiqués en présence active/passive ou en l’absence des parents. En résumé, il semble que bien qu’une attention conjointe et participative portée par les parents soit un facteur positif dans l’attention que porte à son tour le nourrisson, et cette complémentarité entre les deux protagonistes va dans le sens d’une valorisation des acquisitions du plus jeune. Si différents facteurs comme l’attention soutenue, l’attention partagée, les mouvements oculaires, la gestuelle ont donné lieu à des mesures d’une grande précision, d’où un label scientifique accordé à la démarche, on peut douter qu’il s’agisse d’une réelle nouveauté pour les parents qui s’occupent de leurs enfants. Mais peut-on réellement imaginer que ceux qui ne s’en occupent pas changent d’attitude quand bien même on les obligerait à lire cet article dans une revue de vulgarisation !