Archive for novembre, 2012

Contiguïté vs continuité

samedi, novembre 24th, 2012

Avant était la continuité, après fut la contiguïté et entre les deux, les imprégnations argentiques silhouettant les neurones et démontrant leur individualité. Puis ce fut la synapse, terme inventé par Sir Charles Scott Sherrington, essentiellement de type chimique chez l’homme, située entre deux neurones mais pas exclusivement. Soient donc deux  neurones, comment se parlent-ils ? Par l’intermédiaire de leurs synapses aurait-on envie de répondre, mais ce serait ignorer que des « Neurons Talk Without Synapses » (http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/33350/title/Neurons-Talk-Without-Synapses/). C’est nouveau, ça vient de sortir ? Pas exactement en fait, car le concept était connu mais restait difficile à prouver bien qu’il ait été mis en évidence dans le cervelet des rats au niveau des cellules de Purkinje. Quel pourrait donc être l’intérêt d’une telle découverte au niveau des neurones sensoriels de l’olfaction chez la drosphila melanogaster ? L’analogie humaine bien sûr ! L’olfaction ainsi que la gustation restent pour la physiologie sensorielle relativement mal expliquées. Il était entendu que pour être reconnue, l’information devait atteindre les centres supérieurs. Il se pourrait donc qu’il n’en soit rien. Mais si l’on ne prend pas les mouches avec du vinaigre, peut-on le faire avec l’homme ?

NB : On peut se référer au livre de Physiologie de R.F. Schmidt au chapitre  Synapse électrique p 26 (De Boeck et Larcier, 1999).

Midi, sept heure, l’heure du Berger !

vendredi, novembre 23rd, 2012

Il n’y a pas à se tromper la publicité l’avait bien compris :   « Quand c’est l’heure, c’est l’heure : avant l’heure c’est pas l’heure, après l’heure c’est plus l’heure ! Ainsi en est-il de la prise d’aliments  It’s Not Just What You Eat, But When You Eat It: Penn Study Shows Link Between Fat Cell and Brain Clock Molecules. Si la chronobiologie, relativement ancienne,  a progressivement conquis la biologie, elle rend aussi de plus en plus difficile la définition d’une horloge biologique unique. Le Système nerveux Central semble bien y perdre ses prérogatives. De kapellmeister  incontesté, il semble bien que de simples tissus périphériques puissent le reléguer à un rôle subalterne où il obéirait sans faire entendre la moindre contestation ! Quels pourraient donc être les responsables d’une telle atteinte à la suprématie de celui que l’on a pris longtemps pour le chef d’orchestre : les gènes toujours les gènes, encore les gènes ! On a toujours besoin d’un plus petit que soi !

Qu’est-ce qu’une image ?

dimanche, novembre 18th, 2012

L’imago latine d’où vient le mot image possède au minimum deux sens : celui d’une représentation concrète mais aussi celui d’une représentation analogique. Elle possède en outre un autre sens, scientifique celui-là lorsqu’il désigne le stade final d’un individu dont le développement se déroule en plusieurs phases (en général, oeuf, larve, imago). Aujourd’hui c’est le sens d’une représentation construite auquel il est le plus souvent fait référence. L’homme construit donc des images depuis longtemps comme en témoignent l’art rupestre aussi bien que l’art pariétal. En médecine, l’image occupe une place particulièrement importante et il convient de savoir reconnaître une image construite d’une image qui ne l’est pas. Ainsi par exemple devient-elle artéfact lorsqu’elle est  construite en radiologie. Dés lors en microscopie, on peut se poser la question de savoir si le tissu examiné après fixation et coloration n’occupe pas cette même place, celle d’un artéfact. On peut néanmoins arguer du fait que lorsqu’une erreur est toujours faite dans le même sens, elle tend à s’annuler, tandis que par ailleurs comme l’écrivait H. Poincaré « …. de deux horloges, nous n’avons pas le droit de dire que l’une marche bien et que l’autre marche mal ; nous pouvons dire seulement qu’on a avantage à s’en rapporter aux indications de la première … ». L’utilisation des colorants dits vitaux peut être intéressante  dans certaines études in situ, mais l’absence de fixation empêche dans l’examen des tissus toute conservation.

Aussi que faut-il penser de cet article « Multicolored stain-free histopathology with coherent Raman imaging ? ( http://www.nature.com/labinvest/journal/v92/n11/full/labinvest2012139a.html, cliquez sur Correction to: Laboratory Investigation (2012); doi: 10.1038/labinvest.2012.109; advance online publication, 20 August 2012.). La microscopie par diffusion Raman anti-Stokes cohérente (CARS) est une technique d’imagerie prometteuse qui est de plus en plus utilisée en biologie. En effet, elle permet de sonder directement les fréquences de vibration des liaisons inter-atomiques présentes dans les échantillons biologiques sans marquage, réduisant ainsi les artéfacts de mesures. Cette nouvelle application nécessite un microscope d’un type particulier bien loin du microscope habituel, ainsi qu’une instrumentation miniaturisée que peu de laboratoires  seraient en mesure de s’offrir aujourd’hui. Mais même si cette technique semble encore bien lointaine dans son application, la beauté des images proposées dans l’article et leur lisibilité emportent la conviction !

La médecine comme si vous y étiez !

jeudi, novembre 15th, 2012

A l’occasion de son deux-centième anniversaire, le NEJM propose de revisiter l’histoire de la médecine à partir de ses publications et ceci d’une façon tout à fait ludique (http://nejm200.nejm.org/timeline/?emp=marcom&query=NEW). Il suffit de définir  un ou plusieurs domaines médicaux, puis de choisir les articles selon une grille de quatre critères : pertinence, consultation, discussion, appréciation. Bien sûr, chacun d’entre eux est à la disposition du lecteur. Ensuite, il n’y a plus qu’à se promener sur l’échelle de ces deux cents années selon des étapes préétablies que l’on suivra dans l’ordre ou en sautant de l’une à l’autre selon son inspiration ! Le résultat est à la fois partiel, partial et amusant ! Il est normal et même souhaitable que tout enseignant  se sente investi de la mission de transmettre aux nouvelles générations ses connaissances. Parfois même ce besoin de la transmission emprunte le chemin d’une description sous forme d’un déroulé historique, ce qui a donné lieu dans le domaine susdit à de nombreux ouvrages intitulés « Histoire de la médecine ». Ces ouvrages sont plus ou moins savants, plus ou moins complets dans la mesure où ils reflètent nécessairement la vision de leur auteur. Dans le cas présent, il s’agit ni plus ni moins que d’une bande dessinée construite sur des articles dont les plus anciens reprennent vie au fur et à mesure où le lecteur les consulte. Le didactisme en droite ligne des Etats Unis d’Amérique a encore frappé !

L’Homme et son Pou

mercredi, novembre 7th, 2012

Le pou a quelque chose de spontanément déplaisant. Personne n’aime parler de cet animal minuscule, même si chaque rentrée scolaire voit fleurir des publicités attractives en vue de son éradication « totale et définitive« . Mais cette destruction est-elle bien raisonnable ? La question doit être posée à la lecture de l’article « Of lice and men: A very intimate history » (http://www.newscientist.com/article/mg21628892.000-of-lice-and-men-a-very-intimate-history.html?page=1). Il existerait en effet entre l’homo sapiens (voire l’homme post-moderne pour certains) et le pediculus humanus (le pediculus capitis  et son frère le pediculus corporis, mais non son cousin, le pediculus inguinalis) une histoire intime en dehors de toute image ! En fait chaque espèce animale possèderait son pou, et cette association, que l’on pourrait dire à but lucratif en tout cas pour le second, nous plonge dans la paléontologie. D’une part, il existe plus de 3000 espèces de poux parasites d’animaux spécifiques, mais d’autre part, comme il peut se produire occasionnellement des modifications d’hôtes, il est possible de suivre leur parcours. Aujourd’hui les techniques modernes de séquençage génétique permettent de retrouver les origines des uns, des autres et inversement. Dis moi quel est ton pou et je te dirai quel est ton âge !

GPS pour tous

lundi, novembre 5th, 2012

Comme l’appareil photographique n’est jamais qu’une pâle copie de l’œil humain, avec son diaphragme, sa lentille, son récepteur sensible, il se trouve qu’un des derniers nés de notre technologie, le GPS, ne serait qu’une pâle copie de la mémoire spatiale dont les cellules de grille seraient l’élément de base. Plus encore, cette mémoire ne serait pas l’apanage de l’espèce humaine. A partir d’une hypothèse lancée en 1948, différentes études menées ont démontré depuis que plusieurs espèces animales en seraient également pourvues. On est bien loin de l’animal machine de Descartes, du chien de Pavlov, du béhaviorisme de Skinner, et si l’écureuil retrouve ses provisions, c’est peut-être sa mémoire spatiale qui le lui permêt. Ces cellules sont dites de grille, en raison de leur mode de fonctionnement. En bâtissant une « carte cognitive » de l’espace, elles pourraient être comparées aux repères qu’offrent la longitude et la latitude sur les cartes habituelles. Ces cellules viennent donc d’être retrouvées chez le Macaca mulatta [monkey rhesus] in Scientists identify grid cells in the brains of rhesus monkeys, (http://www.news-medical.net/news/20121029/Scientists-identify-grid-cells-in-the-brains-of-rhesus-monkeys.aspx)], ce qui pourrait permettre d’avancer dans la compréhension de certaines pathologies humaines. Mais le versant humain ne devrait pas occulter le versant animalier. Si l’homme ne REparle pas encore aux animaux qu’il côtoie comme le racontait la mythologie, il est en train de mieux les comprendre en changeant le regard qu’il portait sur eux. Pour terminer on peut sans déplaisir lire un article plus ancien de Bruno Poucet dont le titre « Mémoires de rat… » est on ne peut plus évocateur !(http://histoire-cnrs.revues.org/7472)

 

Un Big Brother peut en cacher un autre !

samedi, novembre 3rd, 2012

Dans La Ferme de G.Orwell les humains ont été remplacés par les animaux, et même si les premiers ne se sont pas totalement retirés, ils ont disparu de ce nouveau monde où les seconds vont tester une organisation qui devrait leur être propre et propice. Que serait-il arrivé si ces deux sociétés s’étaient mutuellement surveillées, la fin aurait-elle été la même ? Aujourd’hui si cette possibilité existe bel et bien (Rats Control Human Avatars, http://news.yahoo.com/rats-control-human-avatars-231125831.html) on a du mal à démêler le virtuel du réel et inversement. En effet une équipe de chercheurs a mis au point un système qui permet à des rats de laboratoire de contrôler un avatar humain dans un environnement virtuel tandis que dans le même temps des humains contrôlent un robot de la taille d’un rat à l’intérieur de sa cage ! Différents types d’application sont envisagées, d’autres déjà en place comme ces robots de télé-présence dont parle Le point (Mars 2012),  » … ce télé-robot permet à la personne qui l’utilise de se mouvoir dans des locaux dans lesquels elle n’est pas et de discuter presque naturellement avec ses collègues …. « . Si avec H. Jonas on pense que le pire est toujours à venir, on ne risque pas d’être déçu !

Platon aurait-il eu raison ?

vendredi, novembre 2nd, 2012

À la question concernant l’acquisition de la connaissance, il existe deux réponses classiques : l’innéité vs l’expérience du sensible. Schématiquement Platon vs Aristote. Comment Platon fait-il la démonstration de l’innéité, c’est le discours du Ménon. Dans un premier temps Ménon demande à Socrate si la vertu peut être enseignée ou si elle est en l’homme. L’exemple que prend Socrate pour démonterer le bien fondé de sa théorie de la réminiscence s’appuie sur la démonstration qu’un problème de géométrie peut être résolu par un esclave, à priori peu expert dans cette discipline ! Dans le cas présent, peut-on considérer qu’il s’agit d’une question beaucoup plus simple, quand il suffit de résoudre le problème de la structure des quasi-cristaux (Like Father, Like Son, http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/32661/title/Like-Father–Like-Son/).  Le quasi-cristal possède un spectre de diffraction comme celui des cristaux classiques, mais contrairement à ceux-ci, sa structure n’est pas périodique. Tel l’esclave du Ménon, c’est d’un enfant de 10 ans qu’est venue la solution. Bien sûr quelques esprits chagrins tiendront plus tard à préciser que le résultat obtenu n’apporte pas la solution aux problèmes posés par ce type de solide ! Il n’empêche, on se sent presque obligé de revisiter la théorie de l’innéité !