Miroir naturel de Narcisse, miroir arme de guerre contre la Gorgone, miroir magique de Blanche Neige, miroir poétique de Cocteau, les miroirs appartiennent depuis toujours à tous les domaines de la vie et sont, peut-être de ce fait, devenus source de nombreuses oeuvres d’art. Mais on doit également leur reconnaître une autre fonction car celui qui appréhende son extériorité par son image réfléchie est nécessairement amené à réfléchir. L’enfant prend conscience de l’intégralité de son corps lorsqu’il se reconnaît dans le miroir, et plus tard bien souvent, l’image que ce miroir donnera risque d’étonner celui qui s’observe puisqu’elle est lui mais pas exactement tel qu’il se voit. Certains sont des virtuoses du miroir, comme Leonard de Vinci et son écriture spéculaire. Et il arrive même que l’utile se joigne à l’agréable, quand le miroir devient thérapeutique (Cognitive Neuroscience Lurking in Art, http://www.the-scientist.com//?articles.view/articleNo/44265/title/Cognitive-Neuroscience-Lurking-in-Art/) ! Cette thérapie mise au point en 1996 grâce à Vilayanur Ramachandran avec l’aide, en 1999, d’Eric Lewin Altschuler a été appliquée aux patients atteints du syndrome du membre fantôme ainsi qu’aux patients souffrant d’une hémiplégie. De quelle façon un miroir est-il donc capable d’avoir une action ? En fait il s’agit d’une duperie, d’une illusion, puisque l’image donnée ferait croire au cerveau que le membre absent ne l’est plus, pas plus que le membre paralysé! C’est de cette illusion que peut naître un nouveau seuil de la douleur, une douleur amoindrie pour le patient. Alors toutes ces oeuvres qui mettent en scène sujet<–>miroir<–>image doivent-elles être étudiées du point de vue des auteurs ou du point de vue du spectateur ? Pour répondre à cette question on ne pourra pas faire autrement que de mener une étude exhaustive par des spécialistes à la fois fins connaisseurs dans l’art et la neurologie (voire la psychiatrie), avec le risque que les résultats se fassent attendre !
Archive for octobre, 2015
Réfléchir pour réfléchir
samedi, octobre 24th, 2015Cyborg en approche !
mardi, octobre 20th, 2015Le cyborg, ou « cybernetic organism » était un être de science fiction, mélangeant à des degrés divers organisme vivant et parties mécaniques. Il s’est d’abord agi d’un humain amélioré, devenu progressivement robot organoïde. Quelqu’il soit il est en fait l’expression d’une interface entre l’organisme vivant et la machine par le biais de la pensée grace à laquelle l’un et l’autre peuvent échanger. Dépassées les lois de la robotique d’Isaac Asimov, l’homme machine tout autant que la machine homme converse avec un presque alter ego. Comment, là est la question : télépathie ou réseaux connectés ? Si la première de ces éventualités reste toujours en mal d’explications, il semble bien que la seconde soit en passe d’être la solution (Brain New World, http://www.the-scientist.com//?articles.view/articleNo/44079/title/Brain-New-World/). Le cerveau reste cette boîte noire qui pense, et si l’on connaît (1875) et enregistre (1920) son activité électrique, la mise en rapport de l’un avec l’autre reste un sujet d’étude. On a pourtant déjà démontré la possibilité d’agir sur un membre-prothèse par l’action de la pensée à condition que vienne en complément un « ordinateur » sans lequel rien ne serait possible. Tirant partie des dernières découvertes scientifiques sur ce sujet, Avatar (incarnation) de James Cameron proposait-il une image de cette puissance exceptionnelle du cerveau. Ainsi fait-on miroiter au public un avenir au delà même de ses fantasmes les plus fous où à l’extrême le cerveau aurait acquis « la puissance totale ». Ne s’agirait-il pas de la version moderne du besoin d’un être supérieur détenteur de la toute puissance, mais auquel on pourrait attribuer aussi bien la bienveillance que la malveillance ce qui autoriserait des explications après lesquelles court toujours l’humanité ?
Encore une nouvelle discrimination !
samedi, octobre 17th, 2015Pourquoi le terme « discrimination » souffre-t-il d’une réputation aussi sulfureuse ? Car est-il injuste et illégitime de distinguer au sein de l’humanité ce qui fait la spécificité de chacun ? Le tout est plus que la somme de ses parties mais nécessite aussi chacune d’entre elle pour sa complétude. Tel est le corps de chacun, et même si l’on a affublé certains organes du qualificatif de noble, personne ne peut vivre en l’absence de l’organe, lorsque celui ci est unique tout autant que des deux, lorsque ceux ci vont par pair. Ainsi vient-on de mettre en évidence une nouvelle façon de « discriminer » les individus les uns des autres (Brain Activity Identifies Individuals, http://www.the-scientist.com//?articles.view/articleNo/44212/title/Brain-Activity-Identifies-Individuals/). Après les empreintes digitales (anciennes) et les microbiomes (plus récents) voici que s’avance le connectome neuronal. Là encore se manifeste ce qui fait de chaque homme une entité propre sur fond de communauté. Faut-il s’en attrister, certes non ! Pas plus qu’il ne convient de ne pas en parler. Bien au contraire puisque les avancées scientifiques tendent toutes à montrer/démontrer que chaque individu est bien unique au sein de l’humanité, qu’il possède une signature qui lui est propre qui le fait se distinguer de son/ses voisin(s). Ainsi devient-il possible d’expliquer ces inattendus quelque soit le domaine considéré. Si le normal a été défini comme l’expression de la majorité, celui qui s’en écarte n’est pas « anormal« . On ne dément pas fondamentalement la théorie de G. Canguilhem selon laquelle le pathologique constitue la réponse normale à une modification, quelle que soit la dite modification. Il peut s’agir d’un gène, d’un récepteur, d’un circuit, d’un agent pathogène ….. pour que l’inattendu survienne. C’est aussi le meilleur moyen pour adapter, par exemple, la thérapeutique. Mais on sait aussi que si l’approche de l’homme tient de plus en plus compte de ses sigularités, il deviendra aussi de plus en plus difficile de savoir faire jouer ensemble tous les différents éléments qui le constituent. La nature n’a pas dit son dernier mot !
Le Nouvel Esprit Scientifique
dimanche, octobre 11th, 2015Deux articles viennent de paraitre et sont particulièrement intéressants par le regard qu’ils portent sur les scientifiques et leurs résultats (Let’s think about cognitive bias, http://www.nature.com/news/let-s-think-about-cognitive-bias-1.18520 et How scientists fool themselves – and how they can stop, http://www.nature.com/news/how-scientists-fool-themselves-and-how-they-can-stop-1.18517?WT.mc_id=SFB_NNEWS_1508_RHBox,). Ce n’est pas tant les remarques concernant l’utilisation des tests statistiques modernisés. La quantité des données traitées n’est plus en effet comparable à celle traitée antérieurement quand les métadonnées n’avaient pas encore droit de cité. Ce n’est pas tant le fait d’utiliser ce qui pourrait être appelé kit statistique et dont l’utilisateur ne sait pas toujours (ne sait que rarement) avec précision ce avec quoi il joue (signification des fameux 5% !). Mais bien qu’exprimées de façon plus ou moins allusives, en tous cas, par légères touches, ce qui est particulièrement important c’est ce qui tendrait à faire accroire l’hypothèse selon laquelle les différents auteurs auraient lu/relu Gaston Bachelard (Regina Nuzzo, auteur du second article est professeur de statistique et journaliste scientifique indépendante). Car en effet quels sont les grands thèmes évoqués ? L’idée a priori, la construction de l’expérimentation, le résultat attendu, la confiance et son corollaire, la déception. Pour finir, il y a ce qui ressemble à une vraie nouvelle idée : celle qui explore le scientifique tel qu’en lui même, à savoir ce que l’on pourrait appeler autobiais intellectuel, et dont il aurait du mal à prendre conscience pour pouvoir s’en débarasser. Ainsi la science s’organiserait-elle selon le trépied suivant : la rupture épistémologique selon Gaston Bachelard, la demande impérative de véracité selon Karl Popper, et le chercheur lui-même qui introduirait à son insu son propre biais intellectel.
Mémoire et oubli
samedi, octobre 10th, 2015Si l’on en croit ce qu’écrivait Bergson (in Matière et Mémoire, 1939) » … Le système nerveux n’a rien d’un appareil qui servirait à fabriquer ou même à préparer des représentations … ». De tous temps, qu’il s’agisse de philosophie aussi bien que de sciences, la mémoire s’est imposée dans sa singularité quand bien même on ne ferait référence qu’à « la faculté de l’esprit ayant pour fonction d’enregistrer, conserver et rappeler des informations« . Elle est même devenue qualificatif des dispositifs physiques, ceux-là même qui dans le domaine informatique, autorisent la conservation et la restitution d’informations en distinguant la mémoire vive, qui doit être réalimenter de la mémoire morte, qui ne le demande pas (pas de confusion avec les mémoires volatiles et non volatiles). Quand on sait que la technique humaine (en général) reproduit (plus ou moins bien) les propriétés des êtres vivants, on n’est pas très étonné de ce que la « mémoire » soit toujours un sujet de recherche attentive. Aujourd’hui des résultats obtenus chez le rat viennent apporter un nouveau regard sur le support matériel de cette propriété immatérielle et exceptionnelle (Genetic Repression Boosts Memory,http://www.the-scientist.com//?articles.view/articleNo/44145/title/Genetic-Repression-Boosts-Memory/). Loin des publicités mensongères vantant les bienfaits d’une quelconque substance « boosteur » de mémoire, il s’agit ni plus ni moins que d’un étude génétique (à noter que les conditions de réalisation peuvent en sembler assez barbares !) tendant à démontrer le rôle d’une répression génique dans les processus de mémorisation. Mais quand on s’appuie sur des expérimentations scientifiquement construites, fiables, robustes et reproductibles qui a priori ne laissent pas de place à une interprétation imaginative, la conclusion est pour le moins inattendue, semblable à un clin d’oeil puisqu’il s’agirait là d’un moyen qui éviterait au cerveau de finir en bouillie “… If you remembered everything, your brain would turn to mush … ” !
Différence n’est pas inégalité !
lundi, octobre 5th, 2015Biologie et culture, sont bien deux mamelles indissociables des différences constatées entre filles et garçons sans que l’on puisse, aujourd’hui encore, prouver que l’un est plus que l’autre en cause. Les tenants historiques de la suprématie du sexe masculin, dit fort, sur le sexe féminin, dit faible, exprimaient la croyance en des différences essentielles menant aux revendications ultérieures des féministes. Différences visibles mais aussi invisibles, parmi lesquelles celles qui pourraient se rencontrer au niveau du cerveau : le cerveau mâle contre le cerveau femelle, quelle belle affiche ! Alors que, depuis longtemps, les expérimentations animales s’adressent de façon prépondérante aux individus mâles, il semble bien, aujourd’hui qu’il existe des différences entre les deux sexes au niveau du cerveau (Sex Differences in the Brain, http://www.the-scientist.com/?articles.view/articleNo/44096/title/Sex-Differences-in-the-Brain/), différences qu’il conviendrait de ne pas ignorer ! Mais les facteurs en cause sont nombreux et interviennent dans des temps plus ou moins précoces du développement puis de la maturation. Premièrement, ce sur quoi il convient s’insister pour ne pas faire que des différences deviennent des inégalités, c’est que pour la majorité des fonctions la distinction n’est pas possible. Deuxièmement, c’est qu’en l’absence de certains facteurs de transcrition, la différenciation se fera dans le sens femelle mais que, lorsque la masculinisation intervient, elle se fait au niveau cellulaire en terme de nombre et de taille de neurones définis dans des localisations spécifiques. Troisièmement que l’épigénétique, à laquelle on peut difficilement attribuer un rôle simplificateur, s’inscrit également dans un nouveau temps par rapport à ce que l’on croyait. Tout porte à croire que les recherches sont loin d’être abouties mais qu’elles pourraient apporter des éléments d’explication dans des désordres psychiatriques « séxués« . Mais ce qui semble peut-être le plus intéressant serait le fait que contrairement aux autres organes, le cerveau n’est pas univoque mais qu’il reflète à des degrés divers masculinisation et féminisation selon les aires. Serait-ce l’image des deux moitiés qui se cherchent, selon le mythe de l’androgye de Platon ?
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Le nouveau DR Frankestein est arrivé !
dimanche, octobre 4th, 2015A l’instar de sa créature, le DR Frankestein a lui même été recréé. Ce n’est plus un homme de chair et de sang qui pouvait se croire proche de Dieu, mais un ensemble de machines dont on ne sait pas si elles y croiront un jour, et peut-être serait-ce là le vrai danger. Hier encore, la connaissance du corps humain et de sa physiologie passaient par l’animal que complétait le raisonnement par analogie. Aujourd’hui si l’animal reste un « objet » de choix, malgré une législation protectrice, il existe d’autres approches. Parmi celles-ci, la génétique occupe une grande place,mais le gène n’est pas l’homme qui reste, par sa complexité, peu ou prou « un inconnu » au regard des thérapeutiques qui peuvent lui être appliquées tout aussi bien que des effets délétères de la vie moderne en général. Le découper en rondelles n’est plus une image aujourd’hui (Virtual human built from more than 5000 slices of a real woman, https://www.newscientist.com/article/mg22730404-000-virtual-human-built-from-more-than-5000-slices-of-a-real-woman/?cmpid=NLC%7CNSNS%7C2015-0110-GLOBAL%7Cnewtemplate&utm_medium=NLC&utm_source=NSNS&utm_content=NewTemplate). On ne connaît pas celui et celle dont les corps sont, en ayant été donnés à la science, également donnés en pâture à tout un chacun puisque les images sont consultables sur la toile. Quoiqu’on en dise, quoiqu’on en pense, il y a bien là encore réification de l’individu, quand bien même il s’agit d’un parfait inconnu et quand dans le même temps on pose le problème du but pour lequel cette option a été choisie . Et poser la question de savoir si l’on pourrait se passer d’un tel outil, valide bien la proposition précédente !